Les premiers mois

Là, 4 ans durant, des centaines de milliers d’hommes interchangeables ont vécu, et bien plus en profondeur –de 2 à 8 m – qu’en surface.

Celle-ci, la  plupart  ne l’ont qu’à peine abordée, n’ont promené sur elle qu’un œil furtif de guetteur, beaucoup ne l’ont parcourue que durant quelques minutes mortelles, et des dizaines de milliers quelques secondes, leurs dernières secondes de vivants.

Et cela, surtout au cours des premiers mois et de l’automne de 1915 qui fut (…) la véritable « année noire » de l’infanterie.

(Louis Guiral, Je les grignote, Champagne 1914-1915)

Pendant le premier hiver, les pertes journalières du corps colonial devant la Main de Massiges se sont élevées à une cinquantaine d’hommes, par régiment en ligne.

A la seule date du 28 décembre 1914, deux bataillons s’élançant à l’assaut avec l’ardeur dont les coloniaux étaient coutumiers se sont fait massacrer sans profit.

Sur un effectif de 1800 hommes engagés, 1100 ne sont pas rentrés dans nos lignes.

Les conditions de ce combat étaient telles que des prisonniers n’ont pu figurer qu’exceptionnellement dans le chiffre des pertes.

La plupart des tranchées étaient bouleversées ; les troupes de première ligne vivaient dans un bourbier ; les bombardements ennemis étaient incessants.
Le tableau des pertes du corps colonial pendant le dernier trimestre de 1914 ne doit pas être éloigné de 11 à 12 000 hommes. 

(Général Rouquerol, la Main de Massiges, 1933)

Ordre d'opération du 26 décembre 1914 :

la 2e Division attaque les tranchées de la Verrue.

Le 28 décembre, le rôle de l'Infanterie Coloniale doit être de tenir constamment l'ennemi sous la menace d'une attaque par un feu violent de fusils et de mitrailleuses dirigé sur tous les ouvrages. Ce feu devra commencer cinq minutes avant l'heure fixée pour l'ouverture du feu de l'artillerie de manière à attirer les allemands dans les tranchées. Il se poursuivra pendant la canonnade, sur les groupes qui pourraient se sauver de leurs tranchées.

L'Infanterie ouvrira le feu sur les tranchées ennemies à 8h30, heure à laquelle on commencera le feu de l'artillerie lourde (...) l'attaque projetée sera exécutée à 9h30;

Dans le reste de la journée, l'Infanterie se montrera très agressive et exécutera fréquemment des salves surtout au moment des tirs d'artillerie pour faire croire à des attaques.

Les ordres donnés sont :

"Tenir coûte que coûte les positions" : le rôle du 3e Régiment sera strictement défensif.

Les hommes sont approvisionnés à 300 cartouches.

Tout est calme au réveil, il pleut, les tranchées sont pleines d'eau.

Toute la journée, pluie ou crachin, grand vent. La nuit, vent ou tempête.

Au petit matin, la lutte reprend avec intensité par de violentes canonnades et fusillades sur la côte 191 (Main de Massiges), Ville-sur-Tourbe, Virginy, et le Calvaire.

A 20h40, la 2e Division fait connaître que l'attaque a échoué et que nous sommes rentrés partout dans nos tranchées". (JMO du 3e RIC)

Alexandre DION, 28 ans, ne rentrera pas , il est porté disparu (voir 2-3-4e RIC, dans LA MEMOIRE DE LA MAIN).

"Une batterie a tiré presque toute la journée sur les tranchées, sans résultat puisque trois ou quatre projectiles au plus, sur sept cent envoyés ont touché leur objectif. Les tirs sont trop longs et inefficaces, la communication téléphonique avec Malmy étant coupée, on ne peut faire rectifier le tir. Le 4e RIC prend pour une attaque la riposte allemande au tir du 3e RIC". (JMO du 3e RIC)


Journellement il est fait mention de bombardement de Massiges, Virginy et souvent Minaucourt ainsi que les demandes de matériaux (piquets, sacs à terre, tôles…) afin d’améliorer l’état pitoyable des tranchées.

Tous les jours les hommes tombent, d’autres sont malades.

Il n’y a pas un jour de calme, l’artillerie française tire entre 500 et 800 obus par jour dans ce secteur.

Le JMO de la  2ème Division d’Infanterie Coloniale note une consommation de 2414 obus le 9 janvier et de 5559 obus le 10 !


La guerre des mines a commencé (documentée et  illustrée par  un ventilateur  de galerie dans les objets de la Main)

 

 

BARBIER

1er Canonnier Servant au 8e Régiment d'Artillerie à Pied, 10e Batterie

Né le ; classe 1897, matricule 224 au recrutement de la Seine 1er Bureau

Profession : fabriquant d'articles pour fumeurs

Rappelé en activité au 8e Régiment d'Artillerie à pied le 01/08/1914

Part pour le front de Champagne en avril-mai 1915.

 

 

"Dirigé vers Suippes, j'arrive dans un combat d'avions à Laval-Wargemoulin. Dirigé sur une batterie de remplacement de Mangin. Le soir même, bombardé au sud du Ravin du Poteau, lieu-dit Bahr-el-Ghazal : trois morts et deux blessés..., moi-même tombé dans une sape de secours, démis le genou droit et l'épaule. Soigné sur le front..." (René Barbier)

Remis de ses blessures, il remplit également des missions de téléphoniste

PHOTO MESNIL LES H 15.08.1915

Passé au 11e Régiment d'Artillerie à pied, 26e Batterie, le 08/03/1916

Lettre adressée à sa fille, Renée, datée du 30/12/1916

Photo prise à l'avant-poste de la Verue, Main de Massiges, "par grande neige" (René Barbier)

René Barbier assure des missions de téléphoniste

Le téléphoniste, avec son appareil portatif, informe le poste de commandement. Prolongeant des lignes stables qui partent du poste central, des lignes volantes sont installées au fur et à mesure des besoins sur les champs de bataille, les lignes passant sous terre ou dans les arbres. Il faut assurer aussi les réparations. Detrou d'obues en trou d'obus

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